20 février 2006

Détail d’oxo 3

Orange. En 1993, deux artistes fous achètent un presse-agrumes et 90 kilos d’oranges. La nuit tombée, ils s’introduisent dans le musée Beaubourg et pénètrent dans l’une des galeries contemporaines. A proximité du kiosque en forme d’orange installé par Bernard Bazile, les deux hommes pressent puis boivent eux-mêmes leurs oranges jusqu’à la dernière goutte car la clientèle se fait rare. Quelques heures plus tard, ils remballent leur matériel et sortent du musée puis vont vomir d’un flot orange dans le caniveau. Le lendemain, personne ne s’aperçoit de rien.

Jaune. En 1996, deux artistes fous achètent une poêle, un réchaud, une boîte d’allumettes, 250 grammes de beurre et une demi-douzaine d’œufs. En pleine nuit, ils pénètrent dans l’enceinte du musée Beaubourg et grimpent au cinquième étage. Là, ils allument le réchaud, déposent une noix de beurre dans la poêle puis font griller les six jaunes d’œufs en regardant avec envie les Bacon accrochés aux murs. Ils mangent leurs jaunes frits puis nettoient les éclaboussures. Le lendemain, personne ne s’aperçoit de rien.

Rose. En 1992, deux artistes fous louent une Citroën XM turbo diesel. Leurs correspondants new-yorkais viennent de les renseigner sur l’arrivée imminente à Paris de Barbara Rose, la grande critique d’art américaine. En soirée, ils se rendent à la porte C de l’aéroport Roissy-Charles-de-Gaulle et accostent la critique d’art en se faisant passer pour le chauffeur et le maître d’hôtel de monsieur X. Flattée, madame Rose monte dans la berline et accepte une coupe de champagne, sans se rendre compte qu’un puissant somnifère y a été versé. La nuit tombée, les deux hommes forcent l’entrée du Centre Georges-Pompidou et y transportent le corps endormi de Barbara Rose. Ils la montent au cinquième étage puis l’installent dans le Container zéro de Jean-Pierre Raynaud, à la place de la rose un peu fanée déposée l’avant-veille par l’artiste. Trois heures plus tard, ils remettent la fleur en place, tandis que la critique d’art, encore assoupie, est amenée à son hôtel et déposée dans sa chambre. Le lendemain, personne ne s’aperçoit de rien.

Bleu. En 1996, deux artistes fous achètent un roulor et un pot de peinture bleue Murnyl. La nuit venue, ils s’introduisent clandestinement dans le musée Beaubourg. Arrivés au niveau des collections contemporaines, ils repeignent en bleu un monochrome d’Yves Klein, au nez et à la barbe des gardiens. Ils remballent leur matériel puis ressortent tranquillement. Le lendemain, personne ne s’aperçoit de rien.